Pathways : Passer de l’intervention à la prévention dans le système de protection de l’enfance du Yukon
La protection de l’enfance, c’est quelque chose de complexe qui évolue constamment.
Certaines familles doivent composer avec des traumatismes aux dimensions multiples, souvent intergénérationnels, et pour les familles autochtones et des Premières Nations du Yukon, bon nombre de ces traumatismes découlent des dizaines d’années d’application de politiques racistes par les gouvernements fédéral et territorial.
Les racines de ce legs sont profondes, mais les Premières Nations et le gouvernement du Yukon collaborent pour changer les choses.
Directrice générale du Conseil des Premières Nations du Yukon, Shadelle Chambers s’occupe de la plupart des dossiers de l’organisation touchant la protection de l’enfance.
« Les enfants des Premières Nations du Yukon sont surreprésentés dans le système de protection de l’enfance. »Shadelle Chambers
« Les Premières Nations du territoire doivent avoir leur mot à dire pour que les pratiques et politiques de protection de l’enfance tiennent compte de leurs besoins et de leur passé », affirme-t-elle.
Grâce à la modification de la Loi sur les services à l’enfance et à la famille, les Premières Nations sont désormais au cœur du processus. Les changements ont été décidés avec les Premières Nations, qui sont maintenant incluses dans la Loi en tant que participantes du système.
Leeann Kayseas, directrice des Services à la famille et à l’enfance du gouvernement du Yukon, est d’avis que la Loi évoluera toujours et que certains éléments en seront retirés à mesure que les programmes de prévention deviendront plus courants, car on aura moins besoin de services de protection.
C’est là le but ultime : passer, en protection de l’enfance, de l’intervention à la prévention au moyen d’un soutien complet aux familles.
La Loi oblige le gouvernement du Yukon à fournir du soutien culturel, mais il n’est pas nécessairement le mieux placé pour le faire.
Il conclut donc des contrats avec le Conseil des Premières Nations du Yukon pour la prestation de certains services complets culturellement adaptés.
Selon Shadelle, il s’agit d’un partenariat fructueux et d’un modèle à envisager pour d’autres ressources et services.
Cathie Archbould
Les Services de préservation familiale du Conseil des Premières Nations du Yukon disposent d’une variété de services grâce au financement des gouvernements du Canada et du Yukon : programmes culturels, ressources pour les intervenantes et intervenants en soutien prénatal et les spécialistes de la naissance, application du principe de Jordan et aide aux familles dans le système de protection de l’enfance.
Selon Leeann, la différence se voit dans la collectivité : « Les familles qui recouraient aux Services à la famille et à l’enfance peuvent maintenant décider d’opter pour des programmes du Conseil des Premières Nations du Yukon ou de leur Première Nation. Les familles que nous voyons désormais sont celles qui présentent des besoins criants. »
Et pour elle, c’est là le but : « Je pense que l’équipe des Services à la famille et à l’enfance deviendra de plus en plus petite, car avec les solides mécanismes de prévention qui sont en place, nous n’aurons plus besoin de services de protection. »
Et même si l’équipe des Services à la famille et à l’enfance est maintenant légalement tenue de collaborer avec les Premières Nations du territoire, cela va au-delà de la simple obligation.
« C’est plus qu’une exigence : c’est une responsabilité, un véritable honneur, affirme Leeann. Je m’imagine mal ne pas travailler avec les Premières Nations du Yukon, car sans cette collaboration, nous n’allons pas dans la bonne direction. »
L’un des projets en chantier, la stratégie sur les aidantes et aidants naturels, vise à éliminer les obstacles et à opérer des changements pour recruter et maintenir en poste plus d’aidantes et aidants autochtones et des Premières Nations pour les situations où des enfants doivent être placés à l’extérieur de leur foyer.
« Pour qu’un enfant s’épanouisse, il doit garder ses liens avec sa communauté et sa culture, et le meilleur moyen d’y parvenir, c’est de garder nos enfants dans leur milieu pour qu’ils soient élevés par des gens qui leur ressemblent », explique Shadelle.
Cette collaboration et l’appui croissant pour des programmes dirigés par les Premières Nations du Yukon changent le visage de la protection de l’enfance dans le territoire.
« Il y a à peine cinq ans, les familles n’avaient pas beaucoup de choix, indique Shadelle. Elles devaient faire appel aux Services à la famille et à l’enfance si elles étaient aux prises avec des problèmes de pauvreté ou de dépendance. Aujourd’hui, les Premières Nations du territoire et des organisations comme le Conseil des Premières Nations du Yukon, ses Services de préservation familiale et la Direction de l’éducation des Premières Nations du Yukon, proposent beaucoup plus de services et de ressources. »
Pour rétablir l’équilibre dans le système de protection de l’enfance, il faut du temps, mais surtout des liens reposant sur la confiance et la collaboration. Le gouvernement et les Premières Nations du Yukon font équipe pour faire face, ensemble à la complexité de ce changement systémique et aux défis qui en découlent
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